Une mobilisation massive sur les besoins des publics les plus éloignés de l’emploi et le devenir des ACI, alors que les réponses d’Olivier Dussopt, Ministre du Travail, du Plein Emploi et de l’Insertion et de Thibault Guilluy, Haut-Commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, rédacteur du rapport de préfiguration de France Travail, en partie rassurantes, demeurent incomplètes en matière de préservation du modèle et de visibilité financière.
Pour la première fois et de manière historique, les 6 grands réseaux nationaux représentatifs d’ACI (CHANTIER école, Réseau Cocagne, Coorace, Emmaüs France, la Fédération des acteurs de la solidarité, Le Mouvement des Régies),avec la participation des Restos du Cœur, du Synesi et de France Active, se sont réunis pour incarner ce mouvement social ancré partout en France depuis 40 ans, par le biais d’associations ; un mouvement citoyen qui a précédé l’institutionnalisation des politiques publiques pour trouver des solutions sur les territoires dans l’accompagnement des personnes les plus éloignées de l’emploi. Pour rappel, 51% des salariés recrutés au sein des ACI sont bénéficiaires du RSA*, sachant que les ACI sont le 1er employeur de l’insertion, accompagnant près de la moitié des salariés en insertion**. Des éléments probants de réussite de ce modèle hybride qui sont pourtant requestionnés : « En période de plein emploi, de l’avènement de France Travail, de la feuille de route IAE, nous avons toujours l’impression de devoir nous justifier. », David Horiot, président de CHANTIER école. Au-delà de leur impact positif, les ACI sont aujourd’hui en première ligne des enjeux de transition écologique et sociale, avec leur capacité à innover, et à mobiliser du bénévolat de par leur statut associatif ; le modèle mixte salarié.e.s/bénévoles des Restos du Cœur en étant l’exemple parfait. « Les ACI sont un maillon fort de l’insertion sur le territoire. Ils sont créateurs de projets et innovateurs. » Philippe Gaillard, vice-président de la communauté d’agglomération Riom Limagne et Volcans.
Une coopération des réseaux représentatifs est donc plus que nécessaire pour défendre et promouvoir les ACI. Pour Laurent Pinet, Président du Coorace : « Je suis convaincu que la solution viendra du collectif : une mobilisation collective est née. Elle s’inscrit aussi dans le cadre du collectif IAE qui réunit les 9 réseaux de l’IAE. ». Claude Alphandéry, résistant, banquier et économiste français, fondateur de France Active, fondateur et président d’honneur du Labo de l’ESS, président honoraire du Conseil National de l’Insertion par l’Activité Economique (CNIAE) rappelle qu’il s’agit d’un mouvement basé sur 3 principes : « Des initiatives citoyennes avec le nécessaire soutien des pouvoirs publics, un accompagnement des structures de manière décentralisée et enfin une gouvernance démocratique avec une moralisation financière ». Pour Jean-Pierre Caillon, Directeur d’Accès Réagis : « Les ACI sont le ferment pour créer des espaces de coopération, mais aussi des communs productifs. » et pour Dominique Hays, président du Réseau Cocagne « Les ACI produisent des biens ou des services souvent en réponse à des besoins essentiels. Cette vente de bien et de services n’apporte pas qu’un financement dont nous ne voyons pas comment nous passer, elle apporte une reconnaissance supplémentaire de notre intérêt par les collectivités locales. L’utilité qu’elle renvoie aux personnes qui les réalisent est consubstantielle de la qualité de leur mobilisation et de la qualité de leur parcours. »
Un modèle fort et engagé mais dont l’action est aujourd’hui entravée par l’instabilité des financements du FSE ou de la politique de certains départements divergentes de l’Etat. Les ACI se retrouvent victime d’un manque de visibilité et d’injonctions contradictoire. Cette énième réforme touchant le monde de l’insertion génère une inquiétude plus profonde : celle de la survie des Ateliers Chantiers d’Insertion. « J’ai le sentiment que les financeurs estiment que plus on s’occupe des personnes précaires, plus la structure doit être précaire. Les moyens doivent être réalloués avec un coefficient correctif. » alerte Eric Boyer, Président du Synesi. « Chez nous, le Département nous a annoncé du jour au lendemain qu’il ne finançait plus l’accompagnement. C’est compliqué pour une direction de structure de piloter une activité dans ces conditions, d’assurer les salaires des permanents chaque mois » témoigne Aline Paindavoine, Directrice de la régie rurale en Haute-Marne. « Nous sommes mi-juin 2023, nous venons de recevoir l’arbitrage (à la baisse) de notre financement FSE 2022 – 2023. ». Ce manque de visibilité et de permanence dans les financements impacte les projets et les territoires. Les conditions d’exercices et de mise en œuvre de la politique publique ne sont pas assez sécurisées aujourd’hui pour assurer les objectifs accrus vers l’emploi. Les ACI attendent plus de lisibilité et visibilité sur les postes, le fond social européen ainsi qu’une meilleure coordination entre les départements et l’Etat. « L’IAE doit être considérée non pas comme un coût, mais comme un l’investissement, qui génère des solutions pour notre avenir. Il faut dépasser la question des moyens et favoriser notre dynamique pour transformer la société. » Fanny Gérome, Directrice Générale Adjointe chez France Active.
« Nous ne voulons pas devenir un service administré de l’Etat, nous portons un projet de territoire ancré dans l’économie locale. Nous ne sommes pas un outil mais des professionnel.le.s de l’accompagnement vers l’emploi par l’émancipation des personnes ; des employeurs engagés dans l’Insertion par l’Activité Economique. Cette notion est importante pour bien comprendre notre modèle et son utilité sociale. » Julien Adda, Directeur du Réseau Cocagne
« On peut se réjouir de l’objectif du plein emploi mais en faisant attention de ne laisser personnes au bord du chemin. Le contrat d’engagement [pour les bénéficiaires du RSA] France Travail doit contenir des accompagnements spécifiques à la personne avec un accompagnement socio-professionnel mais quelle place pour les SIAE et notamment les ACI dans celui-ci ? » questionne Nathalie Latour, Directrice générale de la Fédération des acteurs de la solidarité. Les ACI attendent des réponses claires de l’Etat. « En tant qu’expert de l’activité vers l’emploi, nous avons prouvé la pertinence de notre expertise dans l’insertion par l’activité économique via notre connaissance des publics et des habitants de nos territoires ainsi que notre capacité à valoriser le travail des salariés en parcours dans l’économie réelle. », Frédéric Fonton, administrateur référent politique emploi et IAE du Mouvement des Régies. « L’Etat est venu chercher les ACI au moment du Covid sur les situations de précarité alimentaire, sociale et l’hébergement, il est donc encore temps d’associer les experts que nous sommes à France Travail. Notre légitimité n’est plus à prouver et nous sommes prêts à nous engager pour porter encore plus loin le plein emploi. » Yann Fradin, Vice-Président d’Emmaüs France.
Les ACI appellent les pouvoirs publics à prendre leurs responsabilités pour poursuivre et développer la collaboration nécessaire au pilotage et à la mise en œuvre des politiques publiques de l’IAE et de l’emploi, avec :
Pour revoir l’ensemble des interventions de la journée : https://youtube.com/playlist?list=PLYWo8vL-MB4ggzpMhtD5iWcbIKAjoL4Qe
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*Source Ministère du Travail _ 2017
** Source Dares _ février 2023
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